Il était une fois… Villejuif à la ferme

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Cette grande maison dans la prairie bourguignonne, propriété de notre ville depuis novembre 2023, est devenue l’étendard du droit aux vacances pour tous, du bien manger et le symbole d’une réconciliation villes et campagnes. Découvrez la ferme des Frémis. En long, en large et en Tannerre…

Contenu vérifié le 17 juin 2025

Oh la ferme !

Terre d’eau, de bocage et de forêt… On aime Tannerre-en-Puisaye pour sa nature, son patrimoine, son tissu associatif. 3 clics sur le site internet de la commune et le décor est planté : Tannerre-en-Puisaye, petite localité de 28 km² située dans le département de l'Yonne en région Bourgogne-Franche-Comté.

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Tannerre vue du ciel

© Ville de Tannerre-en-Puysaie

  • 170

    kilomètres de Paris

  • 280

    habitants : les Tannerrois et Tannerroises.

Tannerre-en-Puisaye : petite bourgade entre Auxerre et Gien, au cœur de la Communauté de Communes de Puisaye Forterre. Sa forêt, ses cours d’eau et son ferrier antique, classé monument historique, où sont amassés des résidus d'extraction du fer, datant des époques gauloises et gallo-romaines.

Pour les adeptes de la rando, ce beau village sera sans doute votre prochaine destination pour un week-end ou des vacances à la campagne où vous pourrez vous ressourcer en empruntant l’un des sentiers balisés aux noms enchanteurs : les gués sur le Branlin, les belles landes de bois...
En poussant plus loin, vous pourrez découvrir le château en construction de Guédelon ou les vignes de Sancerre.
Ça y est, vous êtes conquis ? Attendez la suite… En prenant de la hauteur, on saisit l’instant. Au lieudit Les Frémis, la ferme de 12 hectares montre ses plus beaux atouts.

Isabelle et Philippe, maraîchers et gardiens du temple

Au cœur de cet écrin de verdure, on rencontre Isabelle et Philippe, tous les deux sont arrivés en 2010 avec l’idée de convertir en bio ces terres céréalières.
Un défi, surtout pour Isabelle, parisienne pure souche et biochimiste au CNRS, pour qui le maraîchage bio fut une reconversion professionnelle.

“ Ce que j’aime dans ce métier, c’est le plaisir de nourrir les gens avec le fruit de son travail. ”

Isabelle Gauffeny

Une pépite dans une botte de foin

Pour comprendre ce qui a poussé notre ville à se mettre au vert, il faut revenir 4 ans en arrière.
2020, la pandémie Covid enferme le monde : confinements à répétition, fermeture des frontières, enfants assignés à résidence, ne pouvant plus sortir, sans activité… 
Très vite les agents du service enfance et les animateurs alertent les élus locaux du besoin urgent d’emmener les enfants au vert.

La municipalité se met donc en quête d’un endroit, capable d’accueillir les enfants de la ville pour des sorties à la journée et de courts séjours de camping, des activités sportives et de nature, des sorties en forêt… La recherche s’annonce compliquée : Un terrain à moins de 2h de Paris, avec de la verdure, un cours d’eau, un espace déjà aménagé, autant chercher une aiguille dans une botte de foin.
Pire encore, il a fallu combattre les préjugés. Beaucoup de propriétaires refusent de vendre à une ville en banlieue de Paris.

“ Quand on leur disait qu’on était une ville de banlieue et qu’on voulait acheter un espace, ça les mettait en stress. Ils avaient du mal à imaginer les banlieusards débarquer… ”

Estelle Tarragon

Directrice générale déléguée à la Ville de Villejuif

À vendre Tannerre-en-Puisaye

12 hectares d’espaces verts, de la forêt, une mare, une rivière à proximité, un corps de ferme, un tracteur, des moutons, des ruches.

Prix : 480 000 euros, net vendeur

Après plusieurs mois de recherches vaines, une annonce en ligne retient l’attention. L’offre, au prix d’un rond-point, coche toutes les cases et plus encore. Elle ouvre aussi la possibilité d’améliorer la qualité de l’alimentation proposée aux enfants de la ville.

Le champ des partisans

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Le Conseil municipal

Mais avant de signer chez le notaire, encore faut-il que le projet soit compris et accepté au sein même du Conseil municipal. Le 9 mai 2023, la séance spéciale Transition écologique s’ouvre. Après 2h de débats vient la délibération sur l’achat de la ferme.

Julie Lambilliote présente ce projet qui “ donne un cadre à la jeunesse pour agir en participant à un projet innovant et qui leur montre que leurs ainés cherchent, qu’ils expérimentent, qu’ils s’engagent avec eux contre le changement climatique ”. Dans la majorité, certains groupes s’interrogent : “ Comment seront organisées ces sorties, avons-nous les agréments ? Comment seront accueillis les familles ? Combien cela va-t-il coûter en budget de fonctionnement ? Ce projet, séduisant de prime abord, n’est pas le bon. ”
Les arguments des partisans de la ferme font face aux contre-arguments. L’opposition réunie et le groupe socialiste votent contre.

Après-tout, est-ce bien le rôle d’une ville de produire choux et carottes ? Villejuif réhabiliterait les kolkhozes ?

” C’est un choix oui, audacieux, sans équivalent. On imagine un autre modèle social réconciliant villes et champs. " ajoute de son côté Antonin Cois, adjoint au maire.
“ Vous attisez les peurs en faisant croire aux gamins que l’on va les envoyer dans un centre de vacances où ils vont revenir avec le tétanos, la polio et d’autres maladies… ” s’amuse Guillaume Bulcourt, adjoint au maire, visant l’opposition.

Après 1h20 d’échanges, le maire conclut en énumérant la liste de tous les acteurs techniques et administratifs qui ont travaillé avec sérieux sur le dossier et rappelle le coût très bas de cet achat en comparaison avec des espaces maraichers en région parisienne.
Débats clos et le 24 octobre 2023, l’achat de la ferme est acté !

3 300

exploitants ont abandonné le bio en 2023. Trop contraignant, peu rentable.

Manger bio, pas si simple

Depuis 2018, la loi Egalim impose des objectifs de bio et de circuits courts pour la restauration municipale. Mais ces objectifs sont souvent « inatteignables pour des communes en Île-de-France. En Île-de-France, il y a un décalage entre le nombre de couverts et la capacité de production maraîchère. Les prix sont extrêmement élevés, et d’autant plus avec l’inflation, détaille le maire dans une colonne de Localtis. Notre cheminement répond potentiellement à des problématiques que rencontrent toutes les communes. »

C’est bien bio tout ça

Les premières livraisons commencent le mardi 7 novembre. Au menu, pour les crèches de la ville : butternut, poireau, patate douce, oignon, persil et échalote.
Les cuisiniers municipaux sont enthousiastes. Leur défi est de composer avec les arrivages liés à la saison, aux récoltes.
Même pas peur ! Nos petites têtes blondes ne bronchent pas à la dégustation. Ça passe crème. Et avant d’arriver dans les assiettes, en petits dés ou en purée, les légumes sont présentés aux enfants à l’état brut pour un temps pédagogique sous la complicité des personnels de crèche.

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Depuis un an, près de 60% des légumes utilisés dans les crèches viennent de la ferme. Pour le moment, seuls 2 hectares sont cultivés mais les 12 hectares de la ferme sont cultivables. Ce qui ouvre la possibilité d’étendre la fourniture de produits au-delà des crèches, à d’autres structures de la restauration municipale.
Mais ce n’est pas le seul volet. Chaque semaine, des paniers solidaires à destination des personnes en situation de précarité sont livrés aux bénéficiaires de la Cohésion sociale sud, près de la cité Jacques-Duclos. Ces paniers solidaires d’une valeur de 20€ sont vendus 5€ aux familles. De quoi faire le plein de vitamines, de tartes et de soupes pour la semaine.

“ Rien de mieux pour un cuisiner que de travailler avec des produits sains et naturels ”

Ludovic M’balle

Responsable de la restauration

Nature et découverte

Des ventres bien remplis et des têtes reposées. À Villejuif, près de 6 enfants sur 10 ne partent jamais en vacances. Le projet municipal vise donc en premier lieu à permettre à nos centres de loisirs de sortir tous les mercredis aux beaux jours durant le printemps, l’été et l’automne. Depuis un an, la ferme est victime de son succès. Nombreux sont ceux à avoir découvert ce site. Florilège, en images :

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La ferme célébrités

L’achat de la ferme suscite curiosité et enthousiasme du côté de la presse. Le Parisien édition Val-de-Marne en fait sa une à deux reprises. Au lendemain du conseil municipal actant l’achat, il titre “ Ferme… le plan vert de Villejuif ”. En janvier, une équipe de France 3 Ile-de-France suit les maraîchers de la ferme à la crèche Paul-Vaillant-Couturier. L’Humanité, France Inter, France Info… les reportages se multiplient, mettant la lumière par la même occasion sur cette petite bourgade de l’Yonne.

Ecouter l'émission de France Inter sur la ferme

En vidéo

Une ferme bio pour la Ville de Villejuif

La Gazette des communes y voit une tendance de fond. La loi Egalim, avec ses exigences de qualité pour la restauration collective, a amené des dizaines de communes à réinventer l’approvisionnement de leurs cantines. Ces opérations bénéficient avant tout aux enfants. Elles permettent aussi aux personnels de cuisine de renouer avec le sens de leur métier. Les collectivités bricolent pour concilier leurs projets avec les opportunités, comme la commune de Mouans-Sartoux, dans les Alpes-Maritimes, qui dès 2005, achète une ferme pour alimenter les cantines de ses groupes scolaires. 

Sollicitation de toutes parts

” Ce qui est pour l’instant une originalité, comme le centre municipal de santé l’était il y a 80 ans, ne le sera peut-être plus dans trente ans ", explique le magazine La Terre. Non pas que les terres agricoles doivent devenir les propriétés des villes mais nous voyons bien que les réponses aux problématiques des uns et des autres peuvent trouver des réponses communes. 
” L’expérimentation fait des émules", précise Pierre Garzon. “ Je reçois de très nombreux appels de maires curieux de ce que nous sommes en train de faire.”

Séminaires, colloques, plateaux télé… les #Villejuif foisonnent, au rythme des saisons. Et il se murmure même que pendant Halloween, les Frémis frémissent !

Avant / Après